Je me suis déshabillé en hâte, je n’en peux plus. Incapable d’ouvrir un livre, et d’abord je n’en ai pas acheté depuis le « dégât de fumée » qui m’interdit de rentrer chez moi. En revanche, ici, dans cette chambre d’hôtel, je bénéficie du luxe minimal d’avoir la télé, canal plus, le câble. Je m’écrabouille entre deux oreillers, m’estourbis sous les coups. La télé est un objet contondant, un marteau-piqueur où chaque image, succédant à une autre, vient écailler un morceau d’esprit critique. Pour l’instant je ne déteste pas, c’est vacances. Alors qu’est-ce qu’il y a à la téloche ? Un texto de l’oiseau blanc tout à l’heure, me disait mate M6 ya… je ne sais plus quelle connerie. C’était à onze heures ce matin, j’étais en rendez-vous et là je me suis dit comment peux-tu encore rêver d’un type pareil. Ma théorie c’est qu’il n’est pas si con qu’il en a l’air, et pourtant… quand il me sort des mate M6 alors qu’il sait très bien que je n’ai pas de télé...
« Mais qu’est-ce que tu fous avec ce type ! »
Ce pourrait être une réflexion de Jane, c’est juste le poste qui n’a pas grésillé une seconde avant de débuter sa logorrhée. Je me dis marrant cette coïncidence, et puis en faits ce n’est pas une coïncidence : c’est un lieu commun. Les programmes sont faits pour que toi, devant, avachi, l’ego pourtant gonflé à bloc, tu croies que le crétin congénital qui prononce sa phrase a un truc en commun avec toi. En l’occurrence, la donzelle en larmes, sur l’écran, ce qu’elle « fout avec ce type » – que je n’ai jamais vu, c’est vrai, mais qui ne m’a pas l’air sympathique – eh bien je ne trouve pas d’explication rationnelle. Car il faut voir la bombasse qui la prend dans ses jolis bras imberbes et bronzés. La bouche qu’il a ce petit mec, faite pour les baisers, pas pour parler, et cette conne qui le laisse déblatérer ses lieux communs alors qu’elle ferait mieux de chercher à le faire gémir. Enfin, il y a des choses qui m’échappent. Toujours est-il que je me surprends à suivre un programme débile juste à cause d’un minet dont je nourris l’espoir qu’à un moment il hôte son Tee-Shirt. Voilà voilà. Un peu la honte.
Je dois dire que j’ai parfois la sensation que mon désir me différencie de la masse et en effet il m’oblige, au milieu d’un océan hétérosexuel, à préserver une île, une place forte. Nié par les autres, mon désir ne peut être instrumentalisé pour me vendre un produit ou une idée car il entre, par réflexe, en résistance. A cause de cette obligation d’esprit critique induit par l’anormalité sociale de ce désir, certains ont voulu voir dans l’homosexualité une subversion à visée potentiellement politique. Bull shit. Pour sûr il y a dans le comportement volage des homosexuels (surtout les mecs j’ai l’impression) un modèle qui va à l’encontre de celui qui prévaut dans la société bourgeoise, avec le noyau, la famille, le couple et ses enfants… Mais la vérité est que la plupart des pédés n’ont que cet idéal en tête du couple stable, de l’amour pour toujours, et pourquoi pas le mariage ? Pour s’en convaincre, il suffit je crois de rencontrer ces petits gars (sexy) férus de télé de merde, formaté bien comme il faut, et il suffit de regarder les programmes super crétins qu’ils regardent, avec en plus ce cliché peu ragoûtant de l’homo dont les producteurs font leurs choux gras. On va chercher aujourd’hui, ouvertement, le public gay (et le mot anglo-saxon se justifie à cause du modèle qui descend depuis les USA) en exhibant un jeune éphèbe écervelé, en s’amusant des manières d’un autre, styliste ou coiffeur, et en flattant le bougre pour sa sensibilité, son bon goût, sa proximité avec les femmes. C’est à vomir, mais le garçon aux bras de poupée Big Jim que je vois bouger dans le poste vient à l’instant de me piéger. Je me suis fait hameçonné par la beauté prémâchée d’un comédien de bas étage. J’ai envie d’apercevoir un bout de sa peau, d’observer la façon dont ses muscles jouent sous le tissu de son futal. Je vais très vite me reprendre, en changeant de chaîne par exemple, parce que la pauvreté des dialogues finira par m’agacer. J’avoue même nourrir l’espoir, à terme, que mon désir ne sera pas l’instrument de ma servitude. Mais je pense que ce sera un combat de chaque jour, comme celui que je mène in petto pour mes objectifs quotidiens : bosser, écrire, courir, pas trop manger, sourire à un beau garçon, lui parler, le baiser… Ah ça y est, je m’emballe, on va encore dire que je ne parle que de cul. Je me demande s’il ne faudrait pas que je me soulage une bonne fois, parce que après une branlette, franchement, bogosse ou pas, je changerais de programme. Mais non. Pas de Sopalin à portée de main. Je zappe, j’essaie de suivre plusieurs émissions à la fois. Je compte sur le pouvoir lénifiant de la télévision. L’objectif étant de trouver le sommeil.
1 commentaire:
2 solutions pour trouver le sommeil:
1- etre une gonzesse et marner toute la journée, le boulot la bouffe le linge ,les gosses,le rangement, le ménage, laver le frigo, penser a nettoyer les murs de la cuisine, sous les meubles, faire du tri dans les armoires, faire les courses, les lits, repasser etc...tout ca dans une journée bien sur (je te passe les details quand je dit "s'occuper des gosse")ou:
2- s'ennuyer en bonne compagnie .
Laisse toi donc aller a être con.Tu dormiras mieux.
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