dimanche 23 mars 2008

Stationnement

Rude caresse. Les murs. Les mains dans les poches, l’épaule blanchie par la poudre de stuc, montée Saint Sébastien, je stoppe. Jane, je pense appeler Jane. Elle couche ses gosses, elle me rappelle. Un vieil Arabe assis au seuil de sa boutique me voyant suffoquer se détourne. Je me noie. Les mains dans les poches. La lumière coule à flots depuis les soleils froids de l’éclairage municipal. Je me sens d’autant moins à l’aise que l’endroit, à cette heure, est fréquenté, un groupe de femmes hilare débouche et je reconnais l’épicier de la rue Imbert Colomès qui descend. Des mecs en costard rentrent chez eux, j'espère au moins que c'est pour aller se faire foutre. Quelques automobiles beuglent en embrayant sur la montée. Une petite fille noire traverse sans regarder, j’ai un réflexe tardif, un élan vers elle, est-ce que je dois gronder ? Sa mère ne réagit pas, traverse à son tour, poussette jetée en avant. Un petit garçon aux cheveux jaunes me prend la main. Je le regarde, surpris.
« Ouam, pourquoi es-tu toujours triste ? »
Je flotte, divague, l’enfant a disparu et je suis encore là, pas tout à fait immobile, j’attends quelqu’un. Depuis le temps que je les fixe, le bitume et les bordures de pierre ne me paraissent pas vraisemblables. Des beaux garçons, l’un d’eux soutient mon regard. Est-ce lui que j’attends ? Il s’enfuit. A pas de loup sur la surface. Je n’ai pas la force de refaire mon lacet. Il avait un si beau visage, bienveillant, je voudrais le lacérer, l’abîmer, le déchirer avec les dents. Je n’aime pas mes chaussures noires, elles me rappellent ma misère, un premier prix dans une grande surface. La hampe du panneau interdit de stationner me glace, je m’en éloigne. Des nausées, ma tendresse. Ce qu’elle m’inspire. Lacérer ce visage, puisqu’il n’est pas obnubilé par le mien. Des nausées. L’oiseau blanc. Un texto, sans réponse. J’attends. Jane a dû oublier de rappeler, je sais bien qu’elle est occupée. Je fourre mes mains dans les poches de mon manteau. Je réagis. Je pense à mon poème, au pillow book et je me mets en marche. Je plonge en direction du quartier de la rue Royale, plus de pédés, moins de lumière.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

je n'oublie jamais qu'à moitié de t'appeler, tu es présent dans ma vie comme immuable, là, c'est tout. C'est vrai que des fois les fins de journée difficiles à gerer avec les enfants m'empèche de me souvenir des gens que j'aime, ou plutôt m'empêche d'agir aupres de vous, de toi...
Mon ouam à moi, c'est sur si je ne suis pas ta mère au moins tu es mon frêre.
Mais en ce moment c'est moi qui devrait raser les murs, enfin plutôt me fondre dans la matière.
Jane
PS: Prout
(faut que je pense à mon standing)

Nicolas Raviere a dit…

"plus de pédés, moins de lumières"
J'adore ton constat !

Anonyme a dit…

Purée, on s'absente 2 jours et ça vire glauque, genre Jean Genet !! Si c'est un roman (C'est ?), on peut y mettre ce qu'on veut, non ? Un peu de paillettes ? De mecs pas trop torturés (Pd et normalement névrosé, ça doit bien existé quelque part, même à Lyon) ? D'espoir ? De distractions (du sang de pigeon sur la neige, c'est de saison).