samedi 17 novembre 2007

L'étage suivant

A partir de là, tout change. Le baiser, même raté, transforme ma vision, annihile mon fantasme, esquisse une autre histoire, ce roman ? En tout cas je ne te regarde plus pareil. Tu n’es plus celui qui embrasse une jeune fille, à l’Atmo, à la plage, partout où je t’ai vu le faire. Tu n’es plus là. Tu t’es déplacé. Tu n’es plus ce garçon brun et longiligne que je ne me suis jamais lassé d’épier et tu ne vas pas te retrouver ce soir là à la porte de chez moi. Tu devais venir coucher, ce soir-là, tu habites une banlieue et tu es bourré, c’est dangereux de conduire bourré, enfin, les flics sont partout pendant que la justice, hein... Bon bref tu n’es pas venu en caisse, ça limite les risques. Bien sûr, tu pourrais essayer de niquer ta nouvelle recrue mais, bon, pas de capote. Pas de bras, pas de chocolat, c’est bien connu. Tu sonnes sans cesse à ma porte, oui, c’est peut-être toi, après tout, tu essaies tu essaies, c’est logique, tu me crois à l’intérieur.

« T’es mignon »

Mon pote, il pense qu’il va dormir sur le paillasson, à moins de rentrer à pieds, ça fait une trotte jusque chez sa mère alors il s’affole un peu. En plus il est saoul ce lourd et il faut s’attendre à ce qu’il commette quelque bêtise.

« On va s’asseoir ? »

En plein mois de juillet une fenêtre est restée ouverte, ma mère habite au deuxième, mon pote entame l’ascension.

« Je peux te poser une question ? »

D’abord la porte de l’allée, un énorme panneau de bois sculpté qui ne présente guère de difficultés, puis l’enseigne du coiffeur, mon pote réussi sans peine à se hisser sur la corniche de l’entresol.

« Tu es venu seul ? »

Mon pote, il lui faut maintenant atteindre l’étage suivant.

« Je peux te poser une question ? »

La pointe des pieds sur le rebord de la fenêtre de la voisine du dessous, il attrape la corniche du deuxième.

« Tu fais quoi dans la vie ? »

Mon pote est maintenant en plein milieu de la façade, l’avant-bras posé sur la corniche de pierre, la main droite tendue au-dessus de lui.
« Journaliste, je suis journaliste »
L’enjeu est de choper la grille de fer forgé qui orne le bas de la fenêtre visée, puis de s’accrocher comme à la vie.

« Ah ? Carrément ? »

Impulsion.

« Tu viens chez moi ? »

1 commentaire:

Anonyme a dit…

tant que chante la colombe par dessus le toit avant que la nuit tombe franchis vite le pas.
freud