Parce que tu n’as, aujourd’hui, pas d’autre visage. Qu’une somme de pages noircies, parfois reliée par un boudin de spirales. Dos cartonné noir. Les romans, les poèmes que j’écris te sont tous adressés. Peu à peu ils te dessinent et ce dessin m’échappe tout autant qu’il m’inspire.
C’est un jour Derrida à la télé. Il évoque une voix interne qui n’est pas tout à fait celle qu’il donne à entendre et qui pourtant est la sienne. Lui dit éprouver la sensation d’une voix qui lui dicte ses livres. Je dirais que ce que j’écris est une recherche de corrélation entre cette voix intérieure, avec son rythme, ses accents et ses sonorités (sa chanson ?). L’impression que cet effort pourrait être comme un dialogue entre moi et moi et que la phrase – dès que je l’estime satisfaisante – règle pour un temps non le conflit – je n’en ressens aucun – mais plutôt la dichotomie, le flou. L’écriture est une recherche de cohérence, dit Judith Lesur, j’ajouterais : d’unité.
Toujours est-il que écrire me transforme. Ma lettre d’amour, peu à peu, me détermine. S’il est vrai que l’auteur enfante son oeuvre, l’évidence m’apparaît que le livre, également, porte en lui son auteur : non tout à fait comme une mère, alors, plutôt comme un Dieu ?
J’ai quand même envie de dire qu’au début il y a toi et moi. Moi et mon fantasme de toi. Oui, au commencement, il y a Moi.
1 commentaire:
c'est quand même marrant qu'aujourd'hui même tu dises ca, ecrire c'est une recherche de cohérence, parce que c'est vrai, des fois on ne peut pas parler, alors pour tout reconstruire son dedans on essaye de jeter dehors des morceaux pour les assemblaer comme un puzzle, pour qu'ils forment une chaine ensemble.Mettre de la cohérence dans son desordre intérieur.
Et si je te prenait comme nègre?
paul loup
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