vendredi 28 décembre 2007

Le détail

Avec Jane, il nous arrive de parler même du passé, alors que c’est juste la chose la moins intéressante du monde. Dans ce restaurant un peu gone’s roots, tripailles et fois de volaille, saucisson chaud, quenelles au brochet… des mets à te plomber pour la journée… c’est notre plaisir de papoter, de fluidifier l’instant avec des propos de temps qu’il fait, de celui qui passe. Nous abordons l’inutile avec le sentiment d’être dans l’essentiel et, tiens, elle me dit tu te rappelles nos jeunes années. Rien ne peut me gonfler davantage que les réunions d’anciens élèves – et puis d’abord je n’ai pas du tout l’intention d’être un vieux et là-dessus je saurais rester intransigeant, et je ne dis pas ça juste parce que j’ai bientôt 33 ans (ou non, plutôt 34 ?) et que je me réveille un peu tard mais chez les pédés, si j’ai bien tout compris, au-delà de tes 35 ans c’est plus la peine. Toujours est-il que c’est chiant le passé, lorsqu’on l’évoque j’ai toujours l’impression que c’est pour te barrer l’avenir. Pourtant il y a bien deux ou trois souvenirs excitants… j’ai aimé traîner avec cette espèce de fille dans les rues de Lyon, je sais que j’ai rit à perdre gorge – voire à rendre – si souvent à cause de ses airs de bourgeoise et ses manières de punkette à clebs en jupette et bas mauves, alors j’aurais mauvaise grâce à me lamenter. D’ailleurs la jouissance du souvenir je ne peux la nier. Avec ma copine Jane nous échangeons, au moment de la tarte aux pralines, des sourires affectueux. L'estomac bien calé, on peut dire que ça ne rend pas belliqueux et je me laisse avoir à ce truc écoeurant de l'évocation nostalgique. Comment nous avions tous décidé de s’inscrire en fac de Droit non pour devenir avocat, juge des enfants ou je ne sais encore quelle couillonnade, plutôt parce qu’on avait entendu le message de Coluche : 5 ans de Droit le reste de travers. Comment nous avions hérité d’un local sous l’amphi ou nous mangions, chantions, rigolions, discutions mais pas tant que ça de syndicalisme étudiant et de politique. Ouais, sûr que c’était le temps de l’amitié. Seulement il y avait un hic. Un détail, comme dirait l’autre, je vivais une histoire, secrète, qui m’est aujourd’hui une souffrance et qui se jouait au quotidien pendant cette grande époque des copains. Un drame que je ne ressentais pas comme tel, peut-être parce qu’il ressemblait tellement au bonheur ?

J’aimais.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

c'est peut être pour ça que l'époque des copains est formidable, parcequ'on a tous des secrets si lourds, qu'il faux bien survivre en étant léger le jour.